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Découvrir un trésor caché dans un champ Cela peut arriver à chacun.

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Bernard Reymond

Des trésors enfouis, il y en a par milliers. Mais quand on en découvre un, se l’approprier ne va pas sans risques,surtout s’il s’agit du royaume des cieux.

Une émission de télévision sur les chasseurs de trésors courant la campagne avec leurs détecteurs de métaux m’a mis la puce à l’oreille. Leur quête n’est en effet pas aussi chimérique qu’il paraît. Avant la généralisation des banques et de leurs coffres, le moyen le plus sûr de mettre ses avoirs à l’abri des voleurs était de les enfouir dans le sol. « D’innombrables fortunes au cours de l’histoire de l’humanité ont ainsi été cachées », lit-on sur un site Internet, « et se sont volatilisées, car c’est un fait prouvé : de tout l’or et l’argent extraits depuis l’antiquité jusqu’au début de l’ère industrielle […] il ne subsiste à peine que 25 % en circulation ! 75 % a disparu. » Et les responsables de ce site d’ajouter : « Ainsi des milliers de dépôts sont là sous nos pas qui n’attendent que leurs nouveaux propriétaires… Pourquoi pas vous ! » (www. metaldetection.net/french/milliards.htm). L’homme dont parle l’une des paraboles de Jésus serait-il un prédécesseur de nos modernes détecteurs de richesses enfouies : « Le royaume des cieux est semblable à un trésor qui était caché dans un champ et qu’un homme a découvert : il le cache à nouveau et, dans sa joie, il s’en va, met en vente tout ce qu’il a et achète le champ » (Mt 13,44) ? Le propriétaire ne consentirait pas à vendre son champ s’il savait ce qui s’y trouve. Le trésor qui est enfoui s’y trouve peut-être depuis des siècles. N’en estil pas de même des promesses et exigences émargeant au royaume de Dieu : le respect du prochain, la charité envers les ennemis, le pardon, le don de soi ? Elles sont comme des pépites présentes depuis l’origine dans le coeur et la conscience des humains, mais dissimulées sous des couches et des couches de rituels, de préjugés, de croyances aberrantes, de coutumes barbares ; tout comme le message évangélique est déjà présent en puissance dans le premier Testament, mais recouvert par beaucoup d’autres choses. L’Évangile est à cet égard comme une mise en pleine lumière de ce qui restait enfoui dans les tréfonds de l’âme humaine. Venons-en à l’homme de la parabole. Que faisait-il dans ce champ ? Nous n’en savons rien. Sa découverte, en revanche, est le fruit du hasard. Serait-ce par honnêteté qu’il ne se l’approprie pas purement et simplement ? Par honnêteté ? Peut-être plutôt par prudence, de peur d’être vu en train de creuser et dénoncé à qui de droit. Il recouvre donc le trou qu’il vient de faire et se met en quête du propriétaire pour lui acheter le champ. Ce faisant, il court deux risques. Le premier, énorme, tient à la longueur de la tractation d’achat, surtout si l’on songe à ce qu’est un marchandage oriental, d’autant qu’il doit de surcroît se mettre en quête du propriétaire et le convaincre de lui vendre son bien. Pendant ce temps, quelqu’un qui peut l’avoir vu en train de redissimuler le trésor peut aussi avoir profité de son absence pour le lui dérober. Le second risque tient au fait que, n’ayant pas encore extrait le trésor de sa cachette, il en ignore la valeur. Or, pour acquérir le champ, peut-être un misérable coin de terre, il engage tout ce qu’il possède, indice évident qu’il n’est pas bien riche. Si le prétendu trésor n’en valait pas la peine et qu’il perde au change, il va être la risée de son entourage. Dans le cas contraire, sa manière de vivre va s’en trouver modifiée et les gens devront finalement reconnaître qu’il n’était pas si fou de se livrer à une transaction aussi risquée. Le règne de Dieu, en d’autres termes, requiert de l’audace. Il y faut le culot de miser sur ce « trésor » dont la valeur ne saute pas aux yeux. Comme on l’entend souvent dire, « c’est bien joli d’être chrétien, mais quand même ! » Le monde, d’ordinaire, préfère miser sur d’autres valeurs que celles de l’Évangile. Ce n’en est pas moins au royaume des cieux qu’est liée la promesse de vie. *

Image de Bernard Reymond
Bernard Reymond
né à Lausanne, a été pasteur à Paris (Oratoire), puis dans le canton de Vaud. Professeur honoraire (émérite) depuis 1998, il est particulièrement intéressé par la relation entre les arts et la religion.
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