En 1925, le philosophe catholique Jacques Maritain, dans son livre Trois Réformateurs, s’en prend à ceux qu’il juge être les promoteurs de l’individualisme moderne : Luther parce qu’au nom de sa conviction intime il refuse de se soumettre aux autorités religieuses ; Descartes parce qu’il choisit de penser par lui-même plutôt que de répéter les enseignements reçus ; Rousseau parce qu’il attaque une société qui pervertit et aliène ses membres.
Contre son intention, ce livre dresse un portrait que je trouve positif de l’individualiste. Loin d’être un égoïste, replié sur lui-même, ne cherchant que sa satisfaction, il a le souci de la valeur et de la dignité de la personne. Il refuse qu’on sacrifie un être humain à la collectivité (ainsi pour les dreyfusards le prétendu intérêt national ne légitimait pas une condamnation injuste). Il pense devoir exprimer son opinion personnelle même quand elle va contre son camp (ainsi Gide, sympathisant communiste, pointe en 1936 les dérives de l’U.R.S.S.). Il a le sens de sa responsabilité, il ne laisse pas l’Église, la tradition, le parti ou les médias décider à sa place de ce qu’il doit penser, croire et faire.
L’individualisme est une vertu difficile qu’il faut respecter et cultiver.