Il circule beaucoup d’idées fausses sur la laïcité. La loi de 1905, si elle sépare les Églises et de l’État, ne coupe pas leurs relations ; elle les réorganise ou les réaménage. La laïcité ne cantonne pas le religieux dans le privé (l’article 18 de la Déclaration universelle des Droits de l’homme proclame le droit de manifester « tant en public qu’en privé » sa religion). La laïcité de l’État signifie qu’il n’a pas à dire ce qu’est la vie bonne (ce que font les religions et les idéologies) ; par contre, il lui appartient de définir le comportement juste, autrement dit, de poser des règles pour que cohabitent paisiblement des gens qui n’ont pas la même conception de la vie bonne. Il doit donc s’occuper aussi des religions.
Que le gouvernement réunisse en conférence des musulmans ne me paraît pas contraire à la laïcité. Il ne sort pas de ses compétences quand il demande que tous les imams aient un minimum de formation. Je souhaiterais qu’il aille plus loin et exige que tous les conducteurs de communautés religieuses aient un diplôme universitaire reconnu (ce n’est le cas ni de nombreux pasteurs de petites Églises indépendantes ni des curés qui passent seulement par un séminaire). En effet, de telles études, outre qu’elles permettent à chacun d’approfondir sa propre conception de la vie bonne, sont la meilleure arme pour combattre le sectarisme, l’obscurantisme et le fanatisme qui perturbent le vivre ensemble (le « juste »).