Plateforme du protestantisme de liberté et de progrès

Peut-on perdre la foi ?

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Florence Blondon

C’est une question intrigante, car posée comme cela, elle donne l’impression que l’on met la foi sur le même plan que ses clés ou son téléphone. Or il semble que la foi est d’un tout autre ordre. Il est vrai que l’on parle aussi de « perte » lors de la mort d’une personne. Et probablement que la perte de la foi est douloureuse. Donc, cette formulation n’est pas si erronée, elle peut même nous orienter, car lorsque l’on perd quelque chose, on se met à le chercher. Et si la foi n’est pas une chose, elle n’est jamais non plus un acquis, elle est de l’ordre de la quête. Et toutes celles et ceux qui ont des fermes convictions, qu’elles soient du domaine du religieux, social, politique sont le plus souvent profondément ébranlés lorsque ces dernières semblent être remises en cause. Lorsque le croyant perd la foi, sa vie entière est impactée, désorientée, l’expérience est une souffrance. La foi est d’une telle importance pour les protestants, qu’on la retrouve dans l’un des grands principes : « la foi seule ».

 Qu’est-ce que la foi ?

Avant d’aller au-delà, je pointerai le risque du mauvais usage du vocabulaire : avoir la foi, perdre la foi. Cela inscrit la foi comme un objet, une possession, voire quelque chose que l’on pourrait acquérir. Pourtant, pour le croyant, la foi est avant tout un don. Si l’on se réfère à son sens premier en hébreu (èmounah) elle signifie une relation solide, vraie. Et cette relation nous est offerte par Dieu. C’est une relation confiante, cette confiance que l’on retrouve dans le mot grec pour dire foi : Pistis. Ce don est porteur de sens dans nos existences, et ce verset « Le juste vivra par la foi » revient par trois fois dans la Bible (Ha 2,4 ; Rm1,17 ; Ga,3,11). C’est un don auquel nous sommes appelés à répondre dans la liberté que nous offre Dieu. Avec cette approche, il est difficile d’aborder la question en termes de perte ou de gain, n’est-ce pas plutôt une mise en relation ? Et, cette « perte » n’est en réalité qu’une désillusion. La remise en question des images infantiles que l’on a plaquées sur Dieu. C’est alors que se pose la question de Dieu. Qui est-il ? Quel est le Dieu de ma foi ?

 La question de la foi est indissociable de la question de Dieu.

En effet nous sommes enclins à enfermer Dieu dans des schémas. Certains lisent les passages bibliques comme étant historiques, voire scientifiques, d’autres encore appuient leur foi sur un Dieu tout-puissant, général des armées, guérisseur, finalement un Dieu utilitaire. Ils construisent des discours sur Dieu à l’image de l’homme, de ses envies, oubliant que c’est nous qui sommes appelés à être à la ressemblance de Dieu. Et fatalement lorsque la contradiction, le malheur arrivent, la foi est bien secouée. Soit on culpabilise car on interprète les évènements qui nous assaillent comme manque de foi et c’est totalement mortifère, soit on rejette tout en bloc, la foi, l’Église, Dieu.

 Et si cette perte était salutaire ?

Car le Dieu qui se révèle dans les Écritures est tout autre. C’est un Dieu qui nous libère. Il vient à notre rencontre dans le creuset de notre existence, il nous assure de sa présence et de son amour. C’est à partir de cette rencontre qui se joue parfois dans une voix ténue, un silence (1 Rois 19,23), une promesse, un horizon, que la foi apparaît, et que paradoxalement son socle est solide. Le Christ nous annonce la résurrection et la vie à partir d’un tombeau vide. C’est à partir de nos manques que nous découvrons Dieu. Nous sommes « mendiants de Dieu » (Saint Augustin)

Image de Florence Blondon
Florence Blondon
est pasteure au temple de l’Étoile (Paris).
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