Le croyant se trouve devant un défi : s’humaniser, autrement dit devenir plus proche de l’homme tel que Dieu le souhaite. C’est à cela que sert la spiritualité, avec ses pratiques et ses disciplines. D’un côté, elle attend et reçoit tout de Dieu ; de l’autre, elle exige de chacun un effort, un travail, un combat : c’est le paradoxe de l’existence chrétienne. La spiritualité se vit et se réfléchit. Ce qu’on expérimente nourrit la pensée tandis que la pensée guide, éclaire, oriente ce qu’on vit. Ce va-et-vient entre la vie et la réflexion, les divers textes qui composent ce recueil le mettent en œuvre à propos de thèmes divers : la prière, le baptême, le jeûne, la pénitence, la mort, etc. Certaines des pratiques qu’il décrit me sont étrangères, et cette spiritualité marquée par un piétisme luthérien, influencé par la « confrérie Saint Michel » (dont j’ignore presque tout) comporte des éléments et des accents assez éloignés de ma propre expérience spirituelle qui est, dans la ligne réformée, plus rationnelle que mystique. Peu importe : chacun a son chemin propre et, comme le souligne très justement Siegwalt, il ne faut pas confondre le chemin avec le but. À la fois, il relativise et valorise la piété, ce avec quoi je suis totalement d’accord. J’ai beaucoup apprécié ce qu’il dit, avec une calme audace, de l’accueil ecclésial des homosexuels. Je partage sa critique d’un christianisme qui se rétrécit en ramenant tout à la dialectique du péché et de son pardon, en laissant de côté le cosmos et en oubliant la recherche d’une vie pleinement et positivement vécue. Siegwalt allie une ouverture impressionnante à une grande profondeur spirituelle.
Gérard Siegwalt, Le Défi humain. L’incertitude de l’existence humaine et le combat spirituel. Écrits théologiques V, Cerf, Paris, 2017, 388 pages.